Cinéma

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Découvrez bientôt sur nos écrans le film de Laura Wandel « Un monde » qui aborde le harcèlement scolaire à hauteur d’enfant.

Je vous partage ci-dessous l’article de l’équipe de Chagrin Scolaire qui vous recommande vivement d’aller voir ce film.

Un monde, en salle en avril

Un Monde : Dans les coulisses du harcèlement à l’école

La justesse d’un regard d’enfant.

Beaucoup de films sur le thème du harcèlement scolaire manquent de justesse en se plaçant à un niveau trop « adulte » par rapport à ce problème d’enfant. « Un Monde », le film de Laura Wandel, qui sort en salle la semaine prochaine, n’est pas de ceux-là.

« Nora entre en primaire lorsqu’elle est confrontée au harcèlement dont son grand frère Abel est victime. Tiraillée entre son père qui l’incite à réagir, son besoin de s’intégrer et son frère qui lui demande de garder le silence, Nora se trouve prise dans un terrible conflit de loyauté. Une plongée immersive, à hauteur d’enfant, dans le monde de l’école. »

Les ingrédients de la création du cercle vicieux du harcèlement et de son amplification sont savamment mis en scène dans ce superbe récit, qui contrairement à l’ensemble des films réalisés jusque lors sur le sujet, n’est pas centré uniquement sur les émotions des différents protagonistes. « Un Monde » est d’une extrême finesse dans l’analyse des interactions, dans la dénonciation des solutions toutes faites souvent imaginées par les adultes. Il donne surtout à voir ce que certains ne veulent pas voir et qui pourtant, fait partie, ô combien du problème et devrait conséquemment être pris en compte dans les solutions :

  • Les tentatives d’intervenir, même de la part d’adultes ou d’enfants extrêmement aimants ou bienveillants sont souvent aggravantes, comme l’exprime la jeune Nora au milieu du film, si simplement, si brillamment : « quand on aide, ça empire ».
  • Côtoyer de près un enfant harcelé est dangereux pour ses propres relations, que prendre sa défense l’est encore plus. « C’est à cause de toi que je suis seule, je te déteste », dira-t-elle finalement à son frère harcelé.
  • Les adultes du monde scolaire se sentent très souvent complètement désemparés parce qu’ils ne sont pas formés, comme cette si chaleureuse enseignante à qui Nora demande pourquoi les adultes n’ont pas fait ce qu’il fallait, et qui répond, dans une honnêteté glaçante : «parce qu’il y a des fois, on ne sait pas quoi faire » 
  • La souffrance des parents d’enfants harcelés, souvent légitimement très vive, les fait mettre en œuvre des solutions qui aggravent les souffrances de leurs enfants, alors même qu’ils souhaitent intensément l’inverse, comme ce jeune papa qui vient voir si tout se passe bien en récréation à travers les grilles du collège et met ses deux enfants dans une situation encore plus inconfortable.
  • Un enfant gentil et bien élevé peut en harceler d’autres, comme Abel, qui ne trouve pas d’autre solution que de s’allier à son bourreau pour mettre fin à son calvaire. L’emprise que continue à exercer alors le harceleur sur lui peut être vue comme la continuité de son harcèlement sous une autre forme.
  • Ce fléau peut complètement bloquer les apprentissages d’un enfant alors même que sa motivation et ses aptitudes sont grandes : Nora apprend à vaincre son vertige et sa peur de l’eau, grâce à l’accompagnement tout en douceur d’un remarquable enseignant, puis, délaissée par ses camarades, va jusqu’à se désintéresser de la lecture.
  • Les compétences sociales ne sont jamais vues par les adultes comme les compétences académiques : des apprentissages que l’adulte peut (et devrait) accompagner, sans faire à la place, comme ce professeur de sport qui prend la main de Nora pour l’aider à avancer sur la poutre.

Dans « Un Monde », ce sont les conséquences vitales que la cruauté des pairs peut créer que les jeunes Maya Vanderbecque et Günter Duret incarnent si puissamment : on est happé par cette histoire d’une violente banalité, qui nous fait suivre leur parcours de la cantine à la salle de classe, de la piscine à l’invitation aux anniversaires, avec un risque de mise à mort sociale à chaque instant, et souvent, des passages à l’acte.  Les adultes du film, quand ils interviennent, sont agenouillés ou accroupis à côté des enfants et l’on voit défiler sur le visage de Nora les émotions intenses que leur impuissance crée chez elle : espoir, stupéfaction, tristesse, culpabilité, colère, sans jamais tomber dans le pathos auquel on nous a habitués sur ce thème.

C’est un film à voir, à décortiquer, à expliquer. 

Pour qu’enfin on comprenne tout le chemin qu’il nous reste à parcourir.